Cette équipe du Massachusetts General Hospital (MGH) découvre comment une variante d'une importante enzyme épigénétique interfère avec l'action du système immunitaire inné, l'équilibre du microbiote intestinal et la réponse immunitaire. Ces travaux, publiés dans la revue Science Immunology, montrent que la dite protéine, SP140, est essentielle pour supprimer l'expression inappropriée des gènes dans les macrophages, des cellules immunitaires innées critiques pour le maintien de l'équilibre intestinal. Bref, la réduction de l’expression de SP140 dans les cellules immunitaires augmente l'inflammation intestinale.
Or il se trouve que la même protéine avait déjà été associée par de précédentes études génétiques à la maladie de Crohn et à d'autres troubles immunitaires. Cette nouvelle étude, menée chez la souris, révèle le rôle essentiel de la protéine SP140 dans la fonction immunitaire innée et la santé intestinale.
Ces enzymes qui régulent l’expression de l’épigénome : SP140 fait partie des plus de 400 enzymes qui « écrivent, lisent ou effacent » l'épigénome, et les mutations dans ces enzymes font partie des perturbations les plus répandues dans les cancers. Il est donc intéressant d’identifier des composés capables d’inhiber les effets de ces mutations afin de pouvoir réinitialiser l'expression des gènes, explique le Dr Kate Jeffrey, de l'unité gastro-intestinale MGH et du Centre d’étude de la maladie inflammatoire de l'intestin.
La forme inchangée de SP140 est nécessaire pour l’équilibre intestinal : l’enzyme SP140 est principalement exprimée dans les cellules immunitaires et une des variantes du gène a été associée à la maladie de Crohn, à la sclérose en plaques et à la leucémie lymphocytaire chronique. Dans une série d'expériences, l'équipe montre que la forme inchangée de SP140 est nécessaire pour maintenir l'expression appropriée des gènes qui maintiennent l'identité et la fonction normales des macrophages.
Une perte de protéine SP140 compromet l’équilibre intestinal en réduisant la capacité des macrophages à répondre aux signaux microbiens : ainsi, les chercheurs démontrent que la réduction de l’expression de SP140 dans les cellules immunitaires d'une souris modèle de colite entraîne une augmentation de l'inflammation intestinale. Enfin, l'examen des échantillons de biopsie intestinale d'un groupe de patients atteints de la maladie de Crohn révèle qu’en cas d'expression de SP140 réduite, ces patients répondent mieux au traitement anti-TNF (facteur de nécrose tumorale), un traitement des états inflammatoires efficace dans environ 50% des cas de maladie de Crohn.
Perte de protéine SP140 et efficacité des anti-TNF : La découverte de cette corrélation entre les niveaux intestinaux inférieurs de SP140 et une meilleure réponse à l’anti-TNF va donc permettre de mieux cibler ces thérapies anti-TNF-like sur les patients atteints de maladie de Crohn portant la forme variante de SP140.
D'autres recherches sont nécessaires pour mieux comprendre comment SP140 limite l'expression des gènes inappropriés. L’équipe espère identifier d'autres enzymes épigénétiques qui peuvent être des cibles prometteuses dans la maladie inflammatoire de l'intestin (MICI) et d'autres troubles induits par l'immunité.
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